BMCR 2007.10.06

Le tombe villanoviane di Sesto Fiorentino. L’età del Ferro nel territorio. Istituto Nazionale di Studi Etruschi ed italici. Biblioteca di Studi Etruschi 43

, Le tombe villanoviane di Sesto Fiorentino. L'età del Ferro nel territorio. Istituto Nazionale di Studi Etruschi ed italici. Biblioteca di Studi Etruschi 43. Pisa/Roma: Istituti editoriali e poligrafici internazionali, 2007. 120; pls. 8. €145.00.

A une publication de site archéologique, on demande sobriété, clarté, rigueur et systématisation: autant de qualificatifs pouvant s’appliquer à cette monographie intéressant le site villanovien de Sesto Fiorentino. Publiée sous la direction de Monica Salvini, elle réunit les contributions de 6 autres universitaires florentins.

Le décor est planté par une courte introduction de Giulino de Marinis (ancien coordinateur des fouilles) portant sur le contexte archéologique villanovien de la Toscane septentrionale.

Suit un long développement (pp. 17 à 82) de Monica Salvini reprenant mot pour mot le titre de l’ouvrage et constituant la publication archéologique du site proprement dite. Elle décrit tout d’abord le cadre géologique de Sesto Fiorentino, à quelques kilomètres au nord de Florence, situé au confluent de nombreuses routes commerciales (vers la plaine du Pô, vers les Boïens de l’Emilie-Romagne, vers les Marches ou encore le Latium). Des vestiges villanoviens sont attestés à Fiesole (S. Francesco et S. Apollinare), à Palestrato (tessons épars), à Artiminio (tombe à puits du 8ème -7ème s. av J.-C. dans la nécropole de Prato Rosello), etc.

La nécropole de Sesto Fiorentino ne correspond pas, en réalité, à un site unique et ramassé, mais à 4 zones différentes s’échelonnant sur près de 2 kilomètres de long: Val di Rose (4 tombes à urne) et Madonna del Piano (5 tombes à urne, 2 inhumations en fosse et 2 dépôts animaux: un chien et un bovidé), relativement proches; Dogaia (restes d’une ou de plusieurs sépultures) et Via Lazzareni (1 inhumation en fosse, isolée?), assez éloignés.

Il s’agit dans tous les cas de découvertes fortuites, réalisées à l’occasion de prospections préalables à des chantiers de construction entre 1991 et 1993. Très intelligemment, quelques urnes et squelettes ont fait l’objet d’un prélèvement in situ en bloc suivi d’une fouille fine dans les laboratoires du Centro di Restauro della Soprintendenza per i Beni Archeologici della Toscana.

Le catalogue complet du matériel archéologique est présenté de façon concise et agrémenté de nombreuses illustrations. On regrettera la mauvaise qualité d’une grande partie des figures d’objets archéologiques (netteté insuffisante), comparées aux relevés topographiques impeccables. La comparaison technique et stylistique avec d’autres sites villanoviens est abondante et enrichissante, accompagnée d’une bonne bibliographie, utile et récente. L’ensemble apparaît datable entre le 8ème siècle et le tout début du 7ème siècle av. J.-C.

De quel matériel s’agit-il? Principalement des dolium couverts d’une dalle de pierre contenant chacun un vase biconique (ossuaire), coupes, fibules, anneaux de bronze, fusaïole, couteaux en fer. Un tableau synthétique (pp. 66-67) en donne l’inventaire complet, accompagné, pour comparaison, des données intéressant les sépultures villanoviennes de Florence (Pelliceria, Gambrinus et Via Vecchietti).

Monica Salvini livre enfin ses conclusions sur la distribution des nécropoles, la disposition des sépultures, les tombes à urne, les types de vases-ossuaires, l’échantillon de population représentée, le matériel archéologique, les rites funèbres, le rapport avec les territoires adjacents et une vision d’ensemble sur l’Age du Fer florentin.

Particulièrement intéressant est le cas de la tombe 4 de Madonna del Piano (p. 73), une fosse vide d’ossements mais contenant encore des offrandes funéraires, pour laquelle l’hypothèse d’un cénotaphe ou d’une sépulture symbolique a été soulevée; on aurait cependant souhaité que l’auteur discute plus d’altérations diagénétiques (dissolution squelettique notamment).

L’analyse anthropologique fait l’objet d’un court chapitre par Elsa Pacciani et Sandra Cencetti (pp. 83-89) sur lequel nous nous attarderons. Il s’agirait au total d’un sub-adulte de 12-14 ans, d’un homme adulte jeune, de 4 femmes adultes (dont 1 adulte mature), de 4 hommes adultes, d’un homme juvénile et de 3 sub-adultes de sexe indéterminé. Cependant, de nombreuses déterminations du sexe ont été portées de façon abusive, plus influencées semble-t-il par les offrandes funéraires que par de réels critères anthropologiques fiables. Par exemple, le sexe masculin du sujet de la tombe 2 de Val di Rose n’est posé que sur des épaisseurs corticales et sur la robustesse de certains secteurs anatomiques (p. 83); idem pour le sexe féminin du sujet de la tombe 4 de Val di Rose (p. 84), pour le sexe féminin du sujet de la tombe 1 de Madonna del Piano (p. 84), pour le sexe masculin du sujet de la tombe 3 de Madonna del Piano (p. 85), pour le sexe masculin d’un des sujets de la tombe 5 de Madonna del Piano (pp. 85-86) et pour le sexe masculin de l’inhumation de l’US 17 de Madonna del Piano (p. 88). Certes, la relativisation de la diagnose sexuelle de ces 6 individus minore d’autant l’intérêt de l’étude anthropologique, mais il faut connaître ses limites! Plus de retenue auraient été nécessaire ou, du moins, plus de souplesse dans le rendu des résultats (voir la publication de Jaroslav Bruzek en 2002 dans American Journal of Physical Anthropology pour une méthodologie moderne et irréprochable). A contrario, le sujet de la tombe 3 de Val di Rose apparaît véritablement féminin, la bonne conservation du bassin permettant un diagnostic définitif (p. 84).

Autre critique: la détermination de l’âge au décès ne peut se fonder uniquement sur l’usure dentaire occlusale. Le sujet inhumé dans la tombe à fosse US 11 de Madonna del Piano est à ce titre exemplaire (pp. 86-88): 40 à 50 ans en appliquant la méthode de Lovejoy (1985). On recommandera la lecture des dernières publications d’Aurore Schmitt et Pascal Murail dans ce domaine et notamment leur publication de 2002 dans Journal of Forensic Science.

La paléopathologie est réduite au strict minimum, mais, à l’avantage des anthropologues, le mauvais état de conservation des restes humains n’autorisait pas forcément d’observation pertinente. En revanche, elle est mal exploitée lorsqu’elle s’assied sur des considérations erronées tel l’âge du sujet, par exemple à nouveau chez le sujet inhumé dans la tombe à fosse US 11 de Madonna del Piano: “Lievi segni di artrosi diffusa convalidano l’ipotesi di uno stile di vita molto attivo, considerata l’età non anziana del soggetto” (p. 87).

L’analyse archéo-zoologique des 2 squelettes animaux (chien et bovidé), réalisée par Sandra Cencetti (déjà impliquée dans l’étude anthropologique), Filiberto Chilleri, Fabio Cozzini et Paul Mazza, fait l’objet d’un chapitre détaillé (pp. 91-97). Déposés tous deux dans des fosses sous la forme de véritables sépultures, ils consistaient après étude en un Bos taurus longifrons (boeuf dont les proportions et les caractéristiques anatomiques semblent indiquer une castration tardive mais pré-pubertaire) et un Canis lupus familiaris (c’est-à-dire un chien domestique).

La réalisation de dosages carbone 14 sur les restes humains et animaux de Madonna del Piano a mis en évidence une nette incongruité de datation rendant nécessaire une courte note explicative de Giuliano de Marinis (pp. 99-100). Il insiste sur un principe simple qui doit faire relativiser le fol emballement des techniques de pointe en histoire ancienne: une bonne et logique interprétation de faits archéologiques est bien plus importante et solide que des dosages aberrants (datation du chien 3260 +/- 60 BP, datation du bovidé 3490 +/- 50 BP, datation du sujet humain 4920 +/- 40 BP). Voilà qui devrait servir d’exemple didactique.

Dans la bibliographie (pp. 101-110), claire et bien présentée, on regrettera l’absence des publications de Daniele Vitali pour le villanovien bolognais (réduite uniquement à celle de 1979 sur le site éponyme).

Enfin, 8 planches en noir et blanc (pp. 113-120) fournissent une iconographie de qualité qui rattrape les défauts précédemment exposés. On regrettera néanmoins l’absence, sur certaines photos, d’une échelle et d’une orientation.

Monica Salvini, qui a déjà publié en 1990 un autre ouvrage dans la même collection ( Fiesole. Contributi alla ricerca delle origini), a ici dirigé l’édition d’une monographie sans prétention mais fort bien organisée, malgré deux points noirs: l’imprudence des évaluations d’âges et de sexe, d’une part, et la qualité très moyenne des dessins archéologiques.